Black Narcissus (1947) : paysages de l'Inde d'en-haut et d'en-bas

Publié le 6 Janvier 2010 par Paesaggio

Catégories : #LIEUX PATRIMONIAUX

Tout a été dit ou presque sur Black Narcissus (1947) de Michael Powell et d'Emeric Pressburger, film britannique en Technicolor, sorti en 1947 avec Deborah Kerr et David Farrar. Pour une fois, l'appelation de film-culte est amplement méritée. On pourra notamment se reporter à la longue analyse de DVD Classik. Mon interprétation personnelle repose sur l'observation des paysages.

Le drame se passe dans l'Himalaya. En-haut dans une sorte de lamasserie en nid d'aigle, en fait un ancien palais où vivait un harem nous dit-on, des bonnes soeurs venues d'Europe se sont installées ; en-bas c'est le village au milieu de la jungle, l'Inde populaire et traditionnelle. Peu de personnes assurent le lien entre les deux à part des enfants. Ce pourrait être Dean, le Britannique bien intégré dans la société indienne qui vit en-bas s'impose en tant qu'Européen à ses compatriotes, mais il n'est pas vraiment accepté en-haut. Seuls la vieille servante et les enfants font exception. Quant aux soeurs qui luttent contre la puissance quasi-maléfique des lieux symbolisée par le vent, le charme du palais et les couleurs flamboyantes du ciel, elles partagent leur regard entre le ciel et un en-bas si lointain qu'il en est invisible. Soeur Rose qui voudra quitter la petite communauté par amour pour Dean devra même remonter vers le palais devenu monastère, rejetée par le bas, puis acceptée par le biais d'une mort atroce. Nous sommes dans un monde de métaphores où lieux et paysages représentent des communautés antagonistes. Les soeurs, pleines de bonnes intentions mais incapables de s'adapter, devront finalement s'avouer vaincues et quitter leur nid d'aigle, de même que les Britanniques devront quitter l'Inde un peu après la fin du tournage (indépendance de l'Inde : 17 août 1947). Si ce n'est pas de la prémonition, cela y ressemble.